Coup de fil à 22 heures. Pas de chance. J’avais décidé de me coucher tôt. Mais c’est une copine. Enfin, une très bonne. Parce que la décision de plonger dans un sommeil, un vrai et de bonne heure, m’avait gagnée depuis ce matin. Franchement, il fallait bien que je trouve une solution pour couper court aux siestes sur le siège du bord dans le métro. Et par conséquent, couper court à mon trajet se résumant de plus en plus « à la station de trop ». Bref. Je le répète: PAS de chance.
Si ma copine m’a appelée, c’est pour me raconter un évènement amoureux venu s’ajouter à une suite de péripéties s’étant étalées sur quelques années. Et pour qu’elle prenne son courage entre ses deux mains et partage avec moi ce qu’elle avait juré la veille ne plus laisser se reproduire, c’est que la situation devait être bien grave.
Bien sûr, agacée (mais le cachant bien), je murmurai ce que je savais d’avance voué à l’échec. Ces mots que l’on se force de dire, alors même que l’on sait inutiles et désuets. Je lui dis que ca passera, que tout le monde est passé par là, que le temps apaise les blessures, que dans quelques années elle regardera en arrière et rira de cet amour et de ce mec qui ne méritait pas ce détour...
Mais elle me dit que non… Que je ne pouvais pas comprendre. Que leur histoire à eux, lui et elle, était différente, qu’elle ne pouvait être réduite aux histoires des autres et qu’elle devait être traitée dans son individualité propre. Et bien sûr, j’acquiescai. Non, pas par hypocrisie. Mais parce qu’il y a quelques mois d’aujourd’hui, j’étais elle. Oui, j’étais Juliette, accusant le monde de ma relation impossible et trouvant dans ma rupture une justification extérieure et étrangère au simple fait que lui et moi… nous faisions 2. Et pas 1.
Parce que nous ne voulons jamais croire qu’il ya des siècles et des siècles que le monde fonctionne ainsi. Que tout le monde aime, rompt, se blesse, blesse, pleure et oublie. Parce qu’il ya en nous du romantisme, de l’égocentrisme, de l’arrogance, des rêves de princesse et de paillettes, qui font que nous croyons souvent notre relation singulière et qui font que nous nous enrageons vite quand une copine, un frère, une mère osent – et comment osent-ils ? – affirmer que tout le monde est passé par là. Oui, comment osent-ils? Comment osent-ils quand lui et moi, nous sommes passés par des routes tout à fait différentes, ces routes que personne, personne, n'aurait pu connaître. Puisque nous les avions inventées...
Alors comme ca… je la laisse faire. Je la laisse faire en souvenir de qui j'étais. Je lui dis qu’il est vrai que leur amour à eux aurait dû durer. Qu’à deux, ils faisaient un très beau couple. Et je l’entends pleurer de plus belle… Mais je sais que rien ne sèchera ses larmes. Rien ne la consolera. Et rien au monde ne pourra la convaincre qu’un jour, dans un avenir proche et lointain, elle se réveillera et sans effort quelconque, sans contrôle de soi, sans produits chimiques et sans liquide intoxicant, sans groupe de copines folles servant de support et sans chansons dépressives, sans crise de rebellion et sans sms de colère, sans nuits blanches et sans discours à soi-même, elle se réveillera heureuse et en beauté, elle rougira à nouveau devant un autre mec à laisser tomber et elle se dira que l’autre histoire après tout… ne méritait pas tout ce drame.
Mais que celle-ci par contre… Celle-ci - et il faut bien me croire cette fois-ci - a tout un autre charme !
©
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire