mardi, octobre 31, 2006

Ce p'tit truc qui est le tien.

Il est très courant, aujourd’hui, de ressembler à tout le monde. En effet, plusieurs institutions militent en faveur de cette transformation fatale. Tout d’abord, notons que les écoles transmettent les mêmes idées et les mêmes positions tranchées qui seront retenues par des élèves aussi attentifs que passifs. Ceux-ci devront avaler de force tout ce qu’on leur raconte sans qu’ils ne puissent y ajouter un apport personnel quelconque. Les « éléments perturbateurs » ayant pu échapper à cette métamorphose la subiront à l’université. Ensuite, le développement continu des mass media qui font véhiculer les mêmes images idéalisées de la mode, de la musique, du succès, etc., fait que l’on s’identifie aux produits offerts – ou plutôt imposés – et qu’on travaille sans cesse une intégration sociale aux conditions strictes et infondées.
Enfin, dans une société où le regard de l’autre est considéré de plus en plus comme étant le reflet de soi, il est devenu rare de rencontrer une personne rebelle qui ose s’affirmer dans ses différences, ses tendances, ses goûts, ses fantaisies et sa conception personnelle de la vie.
Alors nous devenons tous, au fil des jours, progressivement, sûrement, « M. Tout le monde ». Nous devenons cet autre accepté et bien intégré, cet autre qui nous ressemble, qui ressemble aux autres et à tout le monde en définitive, un autre ennuyant, classique, pathétique, peu courageux, presque parfait, bon citoyen.
Nous devenons cet autre, quand il est possible de briller de différence. Nous devenons cet être que nous redoutons en réalité, un être redoutable car vide.

Nous avons tous une qualité caractéristique, un don, un talent, un domaine dans lequel nous pouvons exceller, une envie, un rêve, une ambition, une obsession que l’on repousse quelquefois, un but, une perception propre de la vie et du succès…
Tu as, toi aussi, un truc qui est le tien et qui te rend si différend des autres. Laisse-le grandir. N’aie pas peur de le montrer. Crie-le. Développe-le. Chante si tu sais chanter puisque ça nous donne envie de le faire aussi, même si nous n’avons pas ta voix. Danse si ça fait balancer les hanches du monde. Peins si tu sais peindre la vie. Ecris si tu as quelque chose à dire. Etudie parce que tu sais que tu vas y arriver. Voyage si tu n’es pas content ici. Ne laisse pas tomber cette qualité qui est la tienne même si elle est si différente. Ne la laisse pas tomber, surtout si elle est différente. Ne laisse pas la société faire de toi un individu « comme les autres ». Refuse l’uniformisation imposée. N’accepte pas de t’y conformer. Garde ce truc qui brille en toi. Cette chose qui se dégage de ton sourire et de tes yeux. Cette chose qui nous rend si jaloux quelques fois. Epanouis ce truc qui est le tien. Transmets ton amour de l’excellence. Excelle dans ton domaine au lieu d’être bon en tout. Refuse la mediocrite. Apprends-moi ce que tu sais faire. Même si je n’y arriverai jamais. Car cette chose est la tienne. Cette chose nous fait tous vivre. Nous vivons pour ces p’tits trucs magiques qui sortent d’un décor devenu trop familier pour créer le leur, un décor unique et splendide. Tu peux faire partie d’un monde qui vit en marge d’une société banale, tu peux intégrer un monde créatif et sincère. Il suffit que tu gardes en toi ce p’tit truc qui est le tien.

samedi, octobre 28, 2006

Entre l’amour et l’amitié, une différence de degré.


J’ai toujours cru qu’une différence de nature distinguait l’amour de l’amitié. Tandis que l’amitié se caractérisait par l’honnêteté, la fidélité, le partage, la complicité, les points communs, les confidences, les secrets, les souvenirs etc., l’amour restait flou et indéfinissable. Cette incapacité à le définir, le préciser, l’imaginer, le situer et en définir les contours et les limites entraîne souvent la conclusion erronée de la nature différente de l’amour. Ses effets et conséquences sont eux-mêmes incertains et variables selon les personnes et les relations et ne peuvent donc être comparés à ceux de l’amitié. Supposer que l’amour est inconnu, différent, difficile, voire complexe l’éloignait ainsi de l’amitié qui, elle, est facile à étudier car universelle, et l’on aboutissait ainsi au résultat rapide mais erroné de la distinction tranchée entre ces deux phénomènes.
En réalité, l’amour et l’amitié sont très proches et de divers points communs les rapprochent. Car une relation amoureuse réussie se base sur les principes généraux directeurs de toute relation amicale (fidélité, honnêteté, dialogue, complicité…) avec une différence légère mais fondamentale caractéristique de l’amour : l’attirance physique qui existe entre les amoureux véritables.
Nous aboutissons ainsi à une différence de degré (et non de nature) entre l’amour et l’amitié, l’amour étant l’amitié à laquelle l’on ajoute un petit plus spécifique né du jeu de la séduction : la « chimie ».

Si tu rencontrais le temps...



Si tu rencontrais le temps aujourd’hui, que lui dirais-tu ? Si tu le voyais courir, essayerais-tu de l’arrêter ? Si tu en avais la possibilité, lui cracherais-tu à la figure ? Si tu voulais comprendre, lui demanderais-tu des explications ?
Si tu rencontrais le temps, pourrais-tu lui demander de ma part pourquoi il est toujours pressé ? Pourrais-tu lui dire que j’ai essayé en vain de le retenir ? Pourrais-tu lui faire comprendre que je ne fais plus partie du jeu désormais, qu’il me laisse tranquille car moi, j’ai envie de rester ? Pourrais-tu lui demander pourquoi il fait payer des rides à ceux qui décident de grandir ? Pourrais-tu lui dire que l’équilibre qu’il essaie d’établir entre ceux qui savent trop et ceux qui sont trop beaux en retirant la beauté aux premiers et la sagesse aux seconds est tout à fait ridicule ? Pourrais-tu lui dire que je suis heureuse aujourd’hui et que j’ai décidé une fois pour toute de l’ignorer ? Que je le déteste et qu’il ne me fait plus peur désormais ?

J’ai tant respecté ses règles rigides. Je me suis souvent entendue dire « il est trop tôt pour t’aimer », « il est trop tard, je dois rentrer », « il n’est pas encore temps de nager », « il fait encore un peu froid en mai », « à 18 ans on est trop jeune en réalité »… J’ai essayé de lutter contre lui, tantôt en écrivant et tantôt en prenant des photos. J’ai voulu immortaliser des souvenirs et bien vivre un instant qui me menaçait sans cesse de disparaître. Je me suis pliée aveuglement à des conditions insensées. J’ai parfois même enfermé mes émotions dans des conditions et des délais. J’ai divisé mes relations en étapes temporelles. J’ai passé mon temps à calculer et à mécaniser mes rencontres.

Pourtant, une conversation qui dure le temps d’une soirée peut parfois être bien plus enrichissante qu’une relation de longue durée. A 18 ans on peut être mature quelquefois. Un seul regard est susceptible de transmettre plus d’émotions que suite à l’écoulement des 4 saisons. Et ce soir, j’ai l’impression de bien te connaître. J’ai le sentiment de t’avoir toujours connu. Un sentiment « qui tend vers la certitude » me dirais-tu. Ce soir, je me moque du temps. Ce soir, je ne sais plus exactement ce qu’il veut dire, à quoi il ressemble et s’il existe vraiment. Ce soir… Puisque je te connais.
Si tu rencontrais le temps ? Dis-lui d’aller faire un tour ailleurs et de revenir… Ou pas. Puisque je sais que je ne vais plus grandir. Je le sais. Car tu m’a promis qu’ensemble, on ne peut pas vieillir. Tu m’as fais cette promesse. Une promesse qui défie le temps. Une promesse courageuse et dangereuse. Une promesse qui sera, j’en suis sure, tenue.

Les routes nouvelles.



Je suis toujours partie du principe qu’il faut être soi et se comporter de la même manière avec toutes les personnes que l’on rencontre. S’adapter aux situations diverses et changer légèrement pour mieux plaire à son interlocuteur - en d’autres termes parler de plantes à l’agriculteur, de dents aux dentistes, de livres à l’écrivain - apparaît comme étant une solution bien plus intelligente et évidemment plus efficace puisqu’elle permet de réussir sa vie sociale. Cette faculté propre à certaines personnes de pouvoir participer à n’importe quelle conversation et de trouver des choses à dire même quand le sujet est ennuyant à mort tout en faisant mine d’être sincèrement intéressé est sans doute respectable et je dirais même impressionnante. Mais celle-ci m’a toujours semblé peu naturelle et cousine de l’hypocrisie. De même, empruntant une route nouvelle, l’idée de prendre plus de précautions que d’habitude ne m’a jamais frôlé l’esprit. Adopter un comportement constant quelque soit le chemin à suivre, refuser tout changement quand le monde change et que les gens sont si différents, marcher à la même vitesse quand certaines routes sont dangereuses, c’est être courageux, certes, mais bien trop irréaliste. Car certaines routes sont glissantes, sinueuses, et imprévisibles. Certaines routes ne mènent nulle part en réalité. Et il faut surtout se méfier des routes nouvelles.

lundi, octobre 23, 2006

Mes plus beaux écrits.


Il parait que pour écrire il faut être triste, désespéré ou en colère. Les chansons confirment ce dire, ainsi que les films réussis et les romans les plus populaires. L’écriture requiert donc un état d’esprit spécifique qui est loin d’être heureux. C’est une humeur noire qui est génératrice de tant de merveilles.
Il parait que les plus grands artistes ont eu une vie très difficile. C’est de leurs aventures personnelles qu’ils puisent leur inspiration.
Pour chanter alors, pour danser, créer et notamment écrire, il faut attendre que surgissent une mauvaise aventure, un accident ou encore une déception amoureuse. Car il est évident que les rares créations heureuses transmettent beaucoup moins l’émotion.
N’est-ce pas là une discrimination naturelle qui vient imposer la tristesse à qui veut réussir sa vie d’artiste ? N’est-ce pas du coup éliminer qui se sent heureux, amoureux, tranquille ? N’est-ce pas également transmettre de ce fait des ondes négatives au lieu de propager, par ses paroles et ses écrits, le bonheur ?
Si ce qui précède est vérifié, tout ce que je pourrais dire à son sujet ne serait jamais assez expressif ni assez profond. Si l’on ne ressent vraiment que le malheur de l’autre et que sa joie est difficile à saisir, alors je ne pourrais pas, par mes mots et mes histoires, raconter ses yeux, son regard, ses paroles et sa compagnie. Puisque je suis heureuse et qu’on n’écrit que quand on l’est moins, vous ne saurez rien à propos de lui. Alors j’attendrai la fin – puisqu’il y en a toujours une – pour tout dire. Et pour le moment, notre histoire reste personnelle car trop parfaite. Cette histoire restera secrète car toute tentative de description ne peut être que de qualité moindre et je ne voudrais qu'elle le soit. Je dirais juste que c’est lui qui dictera désormais, indirectement et sans pour autant faire partie de l’histoire racontée, mes plus beaux écrits.

Concurrence de compétences.

Pour survivre aujourd’hui ainsi que pour réussir sa vie professionnelle et sociale, il faut détenir -au moins- un diplôme. Le cursus universitaire apparaît de plus en plus comme étant le prolongement normal des études scolaires. Le niveau d’études requis ne cesse de s’accroître qu’il est difficile de se considérer de nos jours « trop instruit ». Que nos études aient été longues et pénibles, non recherches tardives et minutieuse, nos examens fatigants et souvent trop injustes, peu importe. On ne peut plus jamais se considérer trop qualifié ; bien sûr, si l’on veut rester réaliste.
Le monde actuel est lui-même cultivant. L’élargissement des mass media et la mondialisation offrent des possibilités multiples à ceux qui désirent développer leur capital culturel.
Il est donc normal, je dirais même naturel, aujourd’hui, d’être médecin, avocat, architecte, économiste ou écrivain.
S’instruire et se cultiver, pour vivre. S’instruire et se cultiver, pour survivre. S’instruire pour le professionnel. Se cultiver, pour le social. Les deux, puisque tout le monde est aussi très qualifié.
Le diplôme ne sert plus désormais à départager les bons et les mauvais, les forts et les faibles, ceux qui ont réussi leur vie et ceux qui ont, au contraire, échoué, ceux qui réussissent leur carrière et ceux qui traînent, puisque ce n’est qu’un simple papier détenu par tous.
Le petit plus qui fait d’un individu spécial ou simplement différent des autres, dans cette concurrence folle de compétences, est la modestie. Seule la modestie est aujourd’hui un indice qui permet d’identifier l’intelligence. Car elle seule ne s’apprend pas dans les livres. Elle seule n’est pas transmissible. La modestie est la lucidité qui permet de reconnaître la beauté et l’intelligence des autres. La modestie est la clé de la réussite puisqu’elle donne à l’individu la faculté exceptionnelle de pouvoir voir en l’autre les qualités qui lui manqueraient afin de transformer tout contact humain en un partage enrichissant d’idées, d’expériences et de connaissances.
Modeste est l’homme parfait. Modeste est celui qui sait que des autres il peut tant apprendre. Modeste est celui qui comprend que l’intelligence, la beauté, la richesse, la gentillesse, l’honnêteté, …, sont des qualités universelles qui dépassent le cadre de son existence fragile. Modeste était Socrate.

Paru dans L'Orient Le Jour.

J’ai rêvé de toi.


Non, je ne peux pas te raconter mon rêve. Je peux juste te dire que Platon ne l’aurait pas trouvé absurde.

jeudi, octobre 19, 2006

Les journees vides.



Les journées vides sont des amies hypocrites. Elles donnent l’impression d’être serviables et utiles, calmes et tranquilles, longues et disponibles. Elles nous disent de compter sur elles pour rattraper le travail accumulé, de les laisser faire pour être à jour, de profiter d’elles pour effacer les retards pénibles…
Mais les journées vides sont inutiles en réalité. Elles donnent l’impression d’être interminables mais passent trop vite sans qu’on n’ait avancé d’un pas. Elles nous mettent tellement en confiance qu’il est difficile de travailler. Elles nous disent de reporter travail et études puisque leurs heures sont à notre disposition. Alors on fait la grasse matinée, on regarde un peu la télé, on lit le journal ou une histoire d’amour, on prend un bain chaud et interminable, on va boire un café avec une très bonne amie comme si l’on avait tout le temps du monde… et vite la journée est terminée. Elle se termine avant qu’elle n’ait vraiment commencé puisque le programme qu’on s’était posé n’est même pas achevé…. Parfois même pas commencé.
Alors méfiez-vous des journées vides, des dimanches paresseux et des jours de fête. Travaillons plutôt quand on est pressé et mal organisé, quand les secondes courent et les minutes se bousculent. Car ce n’est que la menace de l’écoulement du temps qui nous rend réellement productif. Quand le temps se fait rare, il acquiert toute sa valeur.

mardi, octobre 17, 2006

Une relation a date d'expiration.


Il n’est pas très rare de rencontrer au Liban des jeunes qui voyagent. Je dirais même qu’il est rare de trouver des jeunes qui décident de rester. Les relations sont de ce fait très instables, les cœurs brisés, les chansons tristes et les factures de téléphone… élevées. Certains s’en vont pour les études, d’autres pour du travail, d’autres encore pour suivre ceux partis étudier et enfin ceux qui partent retrouver ceux qui sont partis travailler. Et il y a surtout ceux qui restent…
Le départ de l’autre est toujours dur, parfois même insupportable à gérer. L’autre s’en va tout à coup, du jour au lendemain, sans préavis. La vie devient vide, insignifiante, accrochée au téléphone.
Mais la situation serait différente si l’on savait à l’avance, dès le premier rendez-vous, que cet autre s’en allait et si l’on connaissait la date exacte de son départ. Les sentiments sont ainsi contrôlés dès le début et étalés dans l’intervalle qui sépare la rencontre du départ.
Le jour du voyage arrive. L’autre s’en va. On l’accompagne peut-être à l’aéroport. Ou pas. Les larmes ne coulent souvent pas. Puisque le scénario était connu et retenu à l’avance. On se dit adieu et bonne chance. On se dit que c’était bien. On se dit que c’est dommage mais que c’est la vie après tout. On n’essaie même pas de se retenir. On sait qu’il s’en ira quand même.
Puis l’on rentre calmement chez soi, pour redormir quelques heures. On s’est réveillé tôt pour les adieux. Les gens qu’on aime bien voyagent souvent le matin. Juste avant de rentrer, on se retourne une dernière fois pour s’assurer que l’avion a bien décollé et qu’il n’est pas resté à l’aéroport. Mais ce n’est pas l’histoire d’amour parfaite. C’est juste une histoire comme tant d’autres… une histoire à date d’expiration.

lundi, octobre 16, 2006

Deux filles sur un bar.


Nous avons tous eu (ou presque), un jour, l’obsession du samedi soir. Nous avons tous essayé un lundi matin, en cours, de trouver un plan pour le samedi soir suivant, afin de réussir une soirée attendue toute la semaine. Nous avons tous passé des jours à programmer, prévoir, anticiper quelques heures seulement, des heures-athlètes qui passeront bien plus vite que les heures habituelles de cours ou de travail. Quelques heures qui passent trop vite, le temps de quelques verres… ou plus. Et une fois passées, l’attente du week-end d’après recommence.
Nous avons tous eu, aussi, des amis du soir, ces amis qu’on ne voit jamais le jour. Ce sont des amis rencontrés un peu partout, et avec qui l’on passe les meilleures soirées. Que font-ils le jour ? Où sont-ils quand ils ne sont pas en boite ? Peu importe.
Je me suis débarrassée de mon obsession du samedi soir il y a quelques années. Et depuis, nombreuses ont été les soirées-télé. Depuis, légère est la différence entre le samedi et les autres jours de la semaine.
Samedi soir dernier, il pleuvait. C’était la première pluie de la saison, insolente, sûre d’elle, imposante et cruelle. Une pluie qui vient mettre un terme définitif et irréversible aux trois mois précédents, trois mois qui ont trouvé le moyen d’être parfaits, malgré l’instabilité politique au Liban. Une pluie qui accepte de coexister avec la chaleur, rien que pour ruiner les esprits encore volatiles, reste agréable de l’été. Rien que pour me dire qu’il faut que j’oublie mes aventures pathétiques et que je redevienne sérieuse et réfléchie, une fois pour toute.
Je décide de sortir quand même, et je vais prendre un verre dans un pub sympa avec une amie d’enfance. Nous parlons de musique, du mec d’à coté, du temps salaud, des mois derniers, des projets futurs, de cette fille qui nous a laissées pour aller à Londres, d’amis infidèles, de déceptions amoureuses et de souvenirs bien drôles. Nous parlons de notre enfance et de nos défauts qui n’ont pas changé. Nous parlons de tout, et vite passe la soirée. La soirée passe et dehors il pleut encore. Nous avons grandi vite, dit-elle. J’acquiesce de l’extérieur pour ne pas la contrarier mais je refuse de l’intérieur. Certaines choses ont changé, mais je ne me sens nullement plus grande pour autant. Tout a changé presque. Mais moi, moins je crois. Je me promets de rester comme ce soir, insouciante et heureuse.
Samedi soir. Une soirée passée avec une copine. Une soirée qui ressemble si peu aux soirées d’autrefois. Une soirée improvisée une heure à l’avance et non pas travaillée un lundi matin, au cours de 8h. Une soirée qui a réuni deux vraies amies. Une soirée qui a résumé une vie. La pluie dehors. Le soleil dedans. Les gens qui bougent. Notre indifférence à leur égard. Etre seules par décision, pour mieux apprécier d’être quelques fois, très entourées.

dimanche, octobre 15, 2006

Pour être lu.


Je crois avoir trouvé la clé du succès dans l’écriture. Je crois savoir ce qu’il faut faire, dans un pays comme le notre, pour être considéré comme un écrivain populaire ou un journaliste talentueux. Rien de plus simple pour avoir son article publié dans un des journaux locaux les plus réputés : parler de politique.
C’est ainsi que j’ai pu, moi qui parle le plus souvent d’amour, de soleil, d’amitié et de ces choses considérées banales et superficielles, avoir mon article publié… et lu.
Pour être lu au Liban, il faut soutenir un parti politique ou au contraire le critiquer énergiquement. Etre neutre n’intéresse point.
Pour être lu ici, il faut avoir un avis politique, une appartenance ou une idéologie. Il faut adorer un leader politique ou le haïr. Ne pas le remarquer c’est du coup ne pas se faire remarquer.
Pour être admis en tant que journaliste, soutenu, respecté et lu, il faut oser s’attaquer à un régime préexistant, s’acharner contre un système préétabli, tenter de bouleverser des normes votées en parlement, insulter des hommes au pouvoir et susciter l’approbation de certains et l’indignation d’autres.
Pour être lu, il faut écrire ce que les autres savent déjà, traduire les pensées d’un peuple qui ne s’intéresse qu’à la politique, faire en sorte qu’il s’identifie aux mots utilisés, aux histoires racontées, aux opinions empruntées.
Pour être lu, il faut être hypocrite. Pour être lu par la majorité de la population, il suffit de trouver l’avis prédominant et se l’approprier.
Car pour être lu, il faut être, comme tous les libanais, révolutionnaire. Il faut se joindre à une révolution qui a trop duré. A-t-elle toujours existé ? Une révolution qui s’étale tellement dans la durée, mérite-t-elle toujours son appellation ? Ne devient-elle pas du coup, l’état normal des choses ?

Ne pas avoir un avis politique, ne point avoir d’appartenance, laisser la politique occuper sa place véritable, à savoir au gouvernement, parler des choses sérieuses comme de la vie, de la beauté, de l’humour, de la santé, du désir, de l’envie de vivre, c’est à mon avis, participer a la plus grande des manifestations.
Ne point avoir d’avis c’est en avoir sans le savoir et sans le vouloir. C’est avoir un avis véritable, contrairement à tous ceux qui adoptent aveuglement l’avis de la foule.
La politique intéresse tout le monde, m’a-t-on dit. Mais la politique ne m’intéresse pas, malheureusement. Et je ne saurais en parler. Je n’ai rien à dire et je n’ai pas d’avis à ce sujet. Alors je parlerai de choses simples, même si je ne serai jamais lue. Je parlerai de ces choses qui concernent directement mon existence. Parce que je ne pense pas que la politique soit l’affaire de tous. Et peut-être que c’est à cause de cette décentralisation poussée à l’extrême que la situation politique va si mal ici.
Laissons la politique à ceux qui font d’elle leur métier. Même s’ils sont nuls et incompétents, laissons-les au moins essayer. Peut-être qu’avec un peu plus de silence, ils pourront un jour travailler. Peut-être que la politique ne fait point partie de nos compétences. Certes, ce pays est le notre. Et les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes. Mais doivent-ils en faire pour autant un travail permanent et continu ?
Je ne parlerai pas de politique. Je parlerai d’une soirée en boite et d’un très beau passant. Je parlerai d’un fondant au chocolat et d’une trop belle chanson. Je parlerai d’un sourire sincère et d’une très belle promesse.
Mon indifférence, c’est ma façon de voter.


PS: cet article a ete publie dans le journal L'orient le jour.

samedi, octobre 14, 2006

Me revoila.

Me revoilà après plus d’une semaine d’absence. Je n’étais pas partie tout à fait. J’ai fait quelques pas hésitants sur des pages que je n’ai pas su remplir. J’avoue que j’ai essayé. J’ai essayé de raconter ces histoires que je racontais naturellement, spontanément, automatiquement, avant. Mais je n’ai pas su le faire. Ça arrive, dit-on. Ça arrive. Puisque ça m’est arrivé. Ma vie s’est arrêtée, pour quelques jours seulement, sur le site ; ma vraie vie. Mais elle a continué ailleurs. J’écrirai, dans les jours qui suivront, ce qui pourrait vous intéresser. J’écrirai encore ce que nous vivons tous, chacun à sa manière. Alors voilà pour la justification, en réponse à ceux qui voulaient savoir pourquoi je n’écrivais plus.
Un des articles publiés sur ce site, Le peuple ou l’Etat, a été publié dans le journal francophone libanais L’orient le jour le mercredi 11 octobre.
A bientôt.

mercredi, octobre 04, 2006

Primo Vivire.

Il est beaucoup plus dur de rire que de pleurer dit-on. Parce qu’il suffit d’observer le monde pour être triste. Il y a tant de choses susceptibles de nous faire des bleus au cœur. Et il est tellement plus rare d’être heureux.
Beaucoup de choses pénibles, fatigantes, effrayantes, décevantes. Beaucoup de situations difficiles. Beaucoup d’accidents imprévus (évidemment !) qui viennent bouleverser une vie elle-même très peu paisible. Beaucoup de malentendus, de travail et d’obstacles. Nous vivons tous à peu près la même chose. Et entre nos vies respectives, des différences d’espace et de temps. Uniquement.
Certains ont la chance de savoir être heureux. Ils savent tirer de chaque instant un sourire, un fou rire, une leçon. Ils voient toujours le coté positif de tout problème. Et au besoin, le créent.
Puisqu’il y a tant de raisons d’être malheureux, et si peu de raison d’être heureux. Puisque souvent nous n’apprécions la vraie valeur des choses qu’après les avoir perdues. Puisque la vie est trop courte. Puisque celle-ci est trop fragile et qu’une bêtise légère peut la mettre en péril. Puisqu’il suffit d’un instant, le temps d’un regard, pour toucher la mort du doigt. Profitons du moment. Profitons d’aujourd’hui. De ce soir.
Parce que tant que la vie continue, tout va bien. Tant que nous pouvons être avec les gens que nous aimons, ceux qui nous aiment, tout va bien. Très bien même. Car les choses n’ont point de valeur. Seules comptent les personnes. Rien d’autre que les personnes.
Je repense à mon passé lointain. A mon passé proche. Au mois dernier, à la semaine dernière, à dimanche soir. Je réalise combien je me suis fais du souci pour rien.
Car je suis là, vivante, heureuse, tranquille. Les gens que j’aime aussi. Je vois la vie. Je la touche. Je la serre. Je lui souris. Je me suis attachée à elle, depuis quelques temps. Depuis dimanche. Je ne l’avais pas vraiment remarquée avant. Une aventure nous a rapprochées. Je la respecte. Je comprends que je ne peux me passer d’elle. Et elle non plus, apparemment. Pas encore. Alors je la remercie.
Tout va très bien. Car Primo vivire.

lundi, octobre 02, 2006

Le peuple ou l'Etat?

C’est parce que nous avons tous le sens critique plus ou moins développé selon les personnes, parce que nous voulons tous améliorer la condition de vie des citoyens, c’est parce que nous aspirons tous à un monde meilleur, c’est parce que nous ne cessons de nous comparer aux pays étrangers dits plus développés comme l’Europe ou les Etats-Unis, que nous refusons le système politique et condamnons des paroles et des écrits les dirigeants de notre pays.
Citoyens du Liban, nous nous plaignons souvent – à raison d’ailleurs – de ne pas connaître la destination exacte des taxes et impôts que nous payons, des cotisations diverses, du manque d’aides sociales et de prestations qui devraient être versées par l’Etat en contrepartie de la participation fiscale. Nous nous plaignons en comparant notre système à un autre où le développement social serait poussé à l’extrême et le droit social en éternelle progression, comme le systeme francais.
L’Etat, cette personne morale qui se doit d’être l’autorité supérieure et suprême dont la fonction essentielle est d’assurer l’ordre, le bien-être, la sécurité, la tranquillite, la salubrite publique et la meilleure organisation possible, est, selon l’avis de la quasi-totalité des libanais, sinon inexistant, du moins inutile.
Supposons que cette thèse soit vérifiée – et il n’y a pas de rumeur sans raison d’être – le Liban fonctionne très bien pour un pays sans véritable dirigeant. Et ceci ne peut s’expliquer que par la grandeur de son peuple.
Si le gouvernement libanais ne sait tenir son rôle en tant qu’agent protecteur, et que le pays soit aussi vivant que le notre – avouons-le- et qu’un Etat est défini par son gouvernement, son territoire et sa population, c’est que le dernier de ses trois éléments, puisque le premier est absent, à savoir la population, est exceptionnel. La population de notre pays est exceptionnelle.
Vous verrez le libanais se distinguer à l’étranger, travailler beaucoup plus et fournir un bien meilleur résultat. Vous le verrez très bien s’adapter aux cultures et langues diverses. Vous le verrez parler de son pays, la lumière aux yeux, le sourire aux lèvres et les souvenirs plein la tête.
Vous verrez le libanais au Liban, toujours prêt à aider les autres, à leur venir en aide au besoin. Vous verrez le libanais qui aime la fête, celui qui n’oublie quand même pas de travailler, celui qui reste attaché à sa terre, malgré la guerre, les menaces constantes et le peu qui lui reste.
Ailleurs, certes, un Etat. Ailleurs, un véritable gouvernement. Mais ailleurs aussi la solitude et l’égoïsme. Ailleurs, l’individu est vraiment seul. Les maisons sont petites. Les familles sont dissoutes. Les regards insignifiants. Les soirées interminables.
Nous avons donc d’un coté un Etat. D’un autre, un peuple. Entre ces deux alternatives, je choisis sans la moindre hésitation la seconde. Car l’Etat, fantôme honnête ou malhonnête est partout invisible. Mais c’est le peuple que je côtoie sans cesse à chaque coin de rue, dans les salles mal chauffées de la fac, sur des chaises longues autour d’une piscine, à 2h du matin sur l’autoroute suite à un accident de voiture, au supermarché, dans les files d’attentes et au travail.
Le peuple libanais, à lui seul, permet de dire que le Liban est un pays magnifique. Parce que si différent des autres. Si différent parce que libanais. Si différent parce que brun, roux et blond à la fois. Parce qu’oriental et occidental à la fois. Parce que superficiel quelques fois et sérieux quand il le faut. Parce que capricieux mais responsable. Parce que jaloux et compétitif. Parce que fort et ambitieux.
Liban, je t’aime. Je t’aime uniquement pour tes libanais. Je t’aime surtout pour ces personnes spéciales avec qui je vis. Je t’aime pour ceux qui te constituent. Et non pas pour un pouvoir utopique dont on pourrait facilement se passer. Alors je décide d’oublier ce tout petit détail. Et de former, avec ce très beau peuple, un nouveau pouvoir, existant et efficace, qui sera, un jour, avec un peu d’effort, beaucoup de volonté, le plus grand des gouvernements.


Article publie dans L'orient le jour.

Un accident.

Je viens de rentrer chez moi. Normalement, j’aurais dû y être il y a une heure ou deux. Mais je viens de vivre la pire soirée de ma vie. Je roulais à toute vitesse, après une très belle soirée entre amis. Je roulais vite, pour arriver vite. Trop vite peut-être. J’ouvris le miroir pour me regarder. Non, je ne suis pas narcissique. Mais c’est un geste que je fais. Un geste imprudent quand on roule à 120 à l’heure. Une seconde plus tard, ou moins, ou plus, je me retrouvai sur un grand bloc de béton, tremblante, saignante, perdue. Les air bags de ma voiture se sont ouvert, comme pour me protéger, leur façon hypocrite de faire. Des gens venus de je ne sais où se précipitent vers moi. Je ne pleure pas. J’essaie de me souvenir du numéro de mon père. J’ai mal. J’ai peur. Je pense au cours de 8h. Au cours que je devais relire avant de dormir. A ma voiture ou plutôt à ce qui constituait, avant, il y a quelques secondes, ma voiture.
Je voulais arriver vite. J’ai fais vite. Je suis arrivée trop tard. Je suis énervée. J’écris. Je me sens un peu chez moi sur mon site. Au moins, ici, c’est rose.
Juste avant, je souriais en pensant que la vie est belle. En réalisant que je n’ai besoin de rien ni de personne pour être heureuse. J’éprouvai, pour la première fois, le sentiment intense de liberté. Au volant d’une voiture qui m’appartient, sur une route que je décide de m’approprier, dans un jeans qui me va, roulant à toute vitesse… Mais ce sentiment trouva la mort à peine né. Et moi… Je ne sais vraiment pas.