mardi, janvier 30, 2007

Beyrouth/Londres

Je marche dans la ville et j’essaie de trouver mon histoire. Mais dans la grandeur de l’espace mes idees nombreuses se bousculent et aucune n’arrive a se distinguer. Je ne trouve pas quoi raconter dans le chaos d’une ville qui ressemble si peu a la mienne. J’adore le froid mais je ne sais le decrire. Je suis anonyme dans ses rues et je ne reconnais aucun visage. Ce sentiment de liberte me donne des ailes. Je marche sans peur de me perdre. Et puis je me perds. Parce que je le veux. Je ne cherche pas de repere. Un cafe au coin d’une rue m’a lair accueillant. Je m’installe seule, cette fois sans pretendre etre accompagnee. A beyrouth, j’aurais plonge mon nez dans un livre, pretendu avoir une conversation profonde au telephone ou fait mine d’attendre quelqu’un. A Londres, anonyme, je savoure le plaisir honnete d’une bon latte fiere d’independance. Je continue ma ballade solitaire. J’observe les regards, les pas presses, les trottoirs experimentes... Je suis seule dans la ville. Seule dans une grande ville. Si petite dans un monde tres grand. Si petite... quand on vient du liban.

samedi, janvier 20, 2007

Excès

Excès. Le mot « excès » résume bien ses derniers mois. Collée sur la vitre d’un restau au huitième étage, elle regarde la vue sur Beyrouth. Elle observe quelques voitures rouler doucement. Les voitures qui se trouvent sur la route un vendredi soir ne sont pas pressées. Elle regarde des chambres s’allumer et d’autres s’éteindre. Elle imagine des histoires, des ruptures, des réconciliations, des soirées solitaires devant la télé, des yeux fermés, des soucis accumulés, des coups de foudres, des histoires normales, des pleurs, des gens faire l’amour et d’autres se détruire. De haut, elle sent qu’elle peut observer, interpréter mais surtout créer. Elle adore ça.
Derrière elle, l’excès. Excès de musique, d’alcool, de fumées, de sourires pathétiques, de regards pervers, de manières, de maquillage, de vulgarité, de mouvements, de bruit, de conversations inutiles, de mensonges réciproques, de mots oisifs, de vies vides, d’autres mal remplies, d’hommes vicieux, de filles hypocrites, de libanais superficiels… Elle regarde dehors. Elle préfère la vie. La vraie. Et se demande ce qu’elle fait, enfermée au huitième. Elle pose son nez contre la vitre. Ridicule ? Peut-être… Mais surtout vraie. Vraie, elle veut être.
Une main se pose sur son épaule. Elle frémit. Plongée dans son conte, plongée dans Beyrouth, plongée dans ses toits, ses chambres, ses lumières, ses histoires, ses secrets, elle avait oublié l’excès autour. Elle se retourne. Derrière elle le mec qu’elle accompagne. Un mec comme les autres ; au comportement excessif. Elle lui sourie d’un sourire qu’elle emprunte aux autres. Elle essaie d’imiter l’hypocrisie. Elle trouve le jeu facile. Et s’y plait. Continue. Ajoute. Améliore. Et adopte un rôle qui doit ressembler à ceux des autres. Il parle. De tout. De rien. Quand tout est rien pour elle. Il parle de lui. Elle s’en fout. Elle essaie un regard qui se veut compréhensif alors qu’il n’est en réalité qu’évasif. Elle pense à son projet. Un projet qui la dévore et qui lui donne une raison de vivre.
Elle fait le tour de la pièce des yeux. Elle espère le retrouver. Mais il n’est pas là. Elle se demande pourquoi il n’est pas venu. Elle décide de s’en aller. Elle tend la main. Prend son sac. Oublie sa veste. Il lui demande des explications. Elle court. Elle ressent le besoin de fuir. Le besoin de respirer. Elle descend dans le froid. Elle est seule sur la route. Le froid lui déchire le visage. Sa robe s’envole dans le vent. Elle pleure en attendant sa voiture. Elle pleure comme un enfant. Elle pleure comme l'enfant qu'elle est parfois. Elle se souvient de sa veste mais décide de la laisser tomber. Ce serait trop dur de remonter. Elle quitte. Elle ne sait pas où aller. Elle fait des tours inutiles dans sa voiture. Des tours excessifs. Elle replonge dans l’excès.

vendredi, janvier 19, 2007

L'amour dans ses substituts

L’amour, le Grand amour, l’amour fou, l’amour destructeur, l’amour épanouissant, l’amour menteur, l’amour normal, l’amour convenable, l'amour egoiste, l’amour maladif, l’amour instable, l’amour tardif, l’amour tout court… Qui n’en rêve pas ? Certains l’ont connu. D’autres l’ont inventé. D’autres encore se sont contentés de l’imaginer… Mais à défaut d’amour, on en puise dans ses substituts.

L’amour dans un regard posé sur son dos… Un regard qu’elle sent. Un regard qui suit ses mouvements. Un regard qui l’a réconforte, qui indique sûrement la fin tragique d’une belle histoire, mais un regard qu’elle aime quand même. Elle danse. Elle sent le regard s’intensifier. Elle bouge. Elle est un peu intimidée. Elle est sûre qu’il la regarde encore. Elle se retourne brusquement. Elle le surprend. Il lui sourie. Lève son verre… En souvenir des beaux moments.
L’amour dans un cheese burger qu’elle dévore en cachette en fin de soirée. L’amour dans ce plaisir primaire qu’il lui procure. Un amour de 500 calories. Un amour qu’elle regrettera aussitôt. Un amour quand même.
L’amour dans un sourire échangé. L’amour dans des yeux noirs… Etaient-ils verts ? En tout cas des couleurs incertaines du noir et de l’alcool. De belles couleurs sans doute. Profondes aussi. L’amour dans un sourire altruiste, dans un regard arrogant, dans des yeux noirs ou verts. L’amour d’une soirée solitaire…
L’amour dans une chanson pathétique qui rappelle une vie sans musique. L’amour dans des paroles trop nulles mais trop vraies, dans des mots simples et détachés qu’elle crie, répète, retient et qui la font rêver…
L’amour dans une très belle robe. Une robe qui souligne la sensualité du corps d’une femme. Une robe ridicule de beauté. Une robe qu’elle n’osera jamais porter. Une robe qui s’impose et qui se fait acheter… Pour passer sa vie –peut-être- enfermée.
L’amour dans un beau texte inachevé. Dans une lettre qu’elle choisit d’écrire plutôt que de sortir. Dans un poème qui devance son imagination, qui se précipite avant ses idées, qui surpasse sa faculté de penser… L’amour dans la création. Quand les sorties se font vides et monotones.
L’amour dans un appel tardif mais sincère. Dans une discussion longue et directe. Dans cet échange fou et impudique. Dans des vérités que l’on jette et qu’on fera mine d’oublier le lendemain… Car même en amitié, certaines choses sont à cacher…

L’amour dans la réussite. Et l’amour dans la défaite. L’amour dans les petites choses de la vie, dans chaque baiser, chaque danse, chaque sourire, chaque projet. L’amour dans ses substituts. Quand il est difficile d’aimer. Dans les substituts de l’amour, un amour, un vrai. Un amour gratuit et sans arrières pensées. Un amour qui remplace… une vie sans amour.

mardi, janvier 16, 2007

Ceux qui partent...

Il y a ceux qui partent pour partir. Ils s’en vont sans savoir ce qui les attend. Ils partent le pas déterminé, le regard sûr, l’esprit prêt à rencontrer, essayer, courir, tomber, pleurer, sourire… Ils partent là-bas s’épanouir. C’est cette destination lointaine et incertaine qu’ils recherchent.

Il y a ceux qui partent pour le voyage. Peu importe le terminus, c’est le chemin qui compte. Ils marcheraient si possible, pourvu qu’ils fassent des rencontres. Tout les intéresse mais rien en même temps, car aucun objet et aucune personne ne saurait les retenir longtemps. Ailleurs, il y a mieux, pensent-ils. Mais à force de rechercher ils ne trouvent rien vraiment. Car ils trouvent tout mais pour un trop court instant. Ils possèdent tout et rien à la fois. Car ils sont attirés par la prochaine station. Une station qui restera prochaine. Voici le profil type du voyageur, qui ressemble beaucoup à celui du dragueur. Quelque part d’autre, ailleurs, là-bas, au loin, à l’étranger, quelqu’un l’attend. On voudrait tant être ce paysage lointain. Mais c’est impossible. Alors on se contente de ses souvenirs, et de ses rêves surtout. Il décrit choses et saveurs une lumière aux yeux. Et il dit ensuite Adieu…

Il y a ceux qui ne partent qu’à moitié. Ils aiment le nouveau décor mais sont envahis par le passé. Ils pensent à leur chambre, à leur lit, à leur belle voisine inaccessible, ils pensent à la rue de la fac, au resto du coin, à l’odeur des crêpes qui se dégage de la cuisine pour envahir la chambre et les réveiller un sourire aux lèvres, ils pensent au bruit de la mer, à ses vagues douces et timides, ils pensent aux discussions tardives sur un balcon discret… Ils pensent à tout. Et ne sont jamais vraiment partis. Ils sont entre un là et un là-bas et vivent difficilement un beau voyage. Il faut les pousser, les regarder sévèrement, les obliger a bien vivre l’aventure. Mais ce sont de mauvais voyageurs.

Ci-dessus une description brève des voyageurs que j’ai connus. J’admire les premiers, j’évite les seconds et je plains les derniers. Qui suis-je vraiment ? Je l’ignore… Ici, le monde que j’aimais. Celui que j’aimerai à nouveau peut-être, une fois guéri. Ailleurs, le monde qui m’attire un peu, celui que j’ignore, qui me tente, me sourit, me séduit.
Partir pour la route ? Partir pour l’arrivée ? Ou partir pour rester ?
Est-ce que nous partons vraiment ? Je ne le pense pas… Car pour partir, il faut d’abord se déplacer, changer d’endroit et de mode de vie, changer d’amis et d’habitudes, d’idées et de visions peut-être. Il faut ensuite que le passé s’éloigne aussi. Mais quand on a un si beau passé, une si belle maison et tellement de souvenirs, ils décident de nous suivre et de partir eux aussi. Alors on part tous ensemble… Oui, là-bas. Pour rester un peu ici.
C’est pour cela qu’on a le regard de l’orient, les gestes de la méditerranée, le sourire libanais, la générosité arabe et l’accent qui chante. C’est pour cela que l’on marche lentement, en balançant les hanches, et en souriant bêtement… C’est au Liban que l’on pense.

Texte publie le 8 aout sur ce site.
Publie dans l'Orient Le Jour le samedi 13 janvier 2007

dimanche, janvier 14, 2007

Le risque

J’hésite. Et si je disais encore une fois une connerie ? Réfléchir, méditer, murmurer quelques mots maladroits et incompréhensibles, prevoir les conséquences, imaginer des réactions moqueuses, rougir… et puis choisir de se taire. Tout un processus qui s’étale dans la durée faisant écouler le délai et perdre la chance de briller. Remarquer trop tard mais trop fort qu’il aurait fallu réagir… Encore une fois cette lucidité tardive qui ne sert à rien à part à alourdir la conscience, haïr la raison, regretter l’opportunité de l’instant et prendre la résolution d’oser qui sera sans doute violée !
Le risque. Plus grand est le risque et plus grand est le profit. N’est-ce pas là une des plus populaires règles de la loi économique ? Je ne sais pas… J’ai pris un risque et j’ai lancé ça au hasard… une règle qui me semble assez logique mais qui pourrait tellement ne pas l’être ! Peu importe… Seul compte le risque.
Que vaut la vie sans risque ? Que vaut la vie sans ce sentiment délicieux d’un danger éventuel ? Que vaut la vie sans ces infinies situations d’incertitude tranchées par un pas courageux vers l’avant qui accepte le défi et accueille par conséquent l’éventualité d’une défaite ? Que vaut-elle sans cet espoir fou de gagner que comporte chaque prise de risque ? Que vaut-elle sans cette attente qui fait mal mais qui promet peut-être une belle récompense ?
L'évaluation des risques est le facteur déterminant de toute prise de décision, dit-on. Mais l’impossibilité de cette évaluation n’empêche pas la prise de la décision. Et c’est là que réside le risque. Il consiste en effet en la perception de la possibilité de la survenance d’un dommage futur et dans l’acceptation de cette probabilité. Le risque est pris par une personne apte a supporter l'attente et en mesure de faire face à des conséquences incertaines mais bien probables.
« Le risque c'est la vie même. On ne peut risquer que sa vie. Et si on ne la risque pas, on ne vit pas » avait ecrit Amélie Nothomb dans un de ses livres (Cosmetique de l'ennemi). Ne rien risquer serait donc un risque plus grand.
Prenons donc le risque de vivre. Risquons la vie. Risquons l’amour. Acceptons l’éventualité d’une déception pour la possibilité du bonheur, aussi minime soit-elle. Acceptons le risque d’échouer en contrepartie de l’espoir de gagner. Risquons une confiance qui pourrait être trahie rien que pour l’envie de l’offrir.
Osons. Risquons. Vivons.
J’hésite. Et puis je me lâche. Et si je disais une connerie ? Peut-être. Mais cette fois, j’accepte le risque. Et désinvolte, je choisis un terrain dangereux, des mots impudiques, des phrases directes, des mots puissants. Je prends le risque. Car s’il est evident de ne pas se tromper en choisissant le chemin le plus sûr, il est certain de ne pas gagner grand-chose non plus. Et c’est la grande victoire que je recherche.
Alors je vais vers lui. Lui que j’évite. Je lui dis ces mots insensés. Des mots d’une personne à risque; les mots d'une personne a risque que je ne suis tellement pas. J’abandonne les mots à double sens que je m’étais appropriés dans le passé, ces mots qui assurent le chemin du retour. Je laisse de coté les sourires incertains d'hypocrisie et j’opte pour un sourire franc et un regard indiscret. Je laisse tomber les phrases longues et imprécises qui nécessitent l’interprétation d’un expert. Je lui dis ces phrases courtes et légères qui ont le pouvoir de plaire. Je jette les mots gentils et passe-partout qui servent aussi bien en amour qu’en amitié. J’oublie d’être formelle. J’oublie de faire semblant d’être heureuse. Et il me raconte sa vie. Ses histoires. Ses défaites. Ses amours. Il risque sa confiance. Il risque son temps. Il risque une fois de plus son cœur… Il choisit le risque. Comme moi, il choisit la vie. La vie… parce qu’elle vaut tellement le coup d’être vécue. La vie pour le goût du risque. Mais surtout le risque… pour le délicieux goût de la vie.

jeudi, janvier 11, 2007

Ma derniere lettre, peut-etre

Ce fut une des plus belles périodes. Une période qui nous rendait heureux je crois… Enfin, surtout moi.
Une période presque parfaite. Je dis presque, car la peur de la voir s’achever me nouait la gorge. Je planais dans un bonheur simple atténué légèrement par une raison préventive qui se veut protectrice. Je croyais en tes plans impossibles. Et j’adorais l’impossible… Y croyais-je vraiment ? Peu importe. Le cri d’y croire était tellement strident que la vérité ne pouvait que paraître ridicule. Je ne sais pas si j’y croyais. C’est un moment fou dans lequel on se permet de se mentir. Se mentir, oui… Se mentir pour s’offrir un amour possible et illimité, un amour qui pourrait s’étaler dans l’avenir. Mais quel avenir ? Dis-moi quel avenir…
Ce fut une période naïve. Une période ensoleillée de fous rires et de promesses fragiles. Une période dans laquelle je fuyais l’amour. Un amour qui s’imposait à tout prix malgré la distance que j’installais et les bons conseils que j’acceptais volontiers.
Oui, ce fut une période qui me vola un bout de vie, un bout d’innocence, un bout de jeunesse, un bout d’été. Pour me faire grandir, souffrir, mûrir et surtout mourir un petit peu. Mourir un peu, pour ensuite revivre une vie sans toi. Une vie sans toi mais tellement différente de celle qui a précédé ton entrée. Une vie que tu as tellement changée…
Ce fut une période pressée et bien remplie, une période volatile et instable, alcoolique et déséquilibrée, interdite et… délicieuse. Une période folle sans doute. Mais surtout très… voulue.
Une période dont je me souviens. Une période que j’essaie parfois de reconstruire poussée par le goût du souvenir. Alors je te donne rendez-vous à la même heure au même endroit. Je prétends pouvoir ressusciter des mois tellement passés et surtout dépassés. Je réinvente le décor, l’ambiance et les mots qu’il faut. Et puis je réalise que l’impossible ne vient qu’à l’improviste. Il s’impose une seule fois quand il n’est point désiré. Le rappeler serait inutile. C’est un jeu soumis à des règles injustes et illogiques.
Une belle période certes. Mais belle et puis c’est tout… Un moment qui s’écoule et qui ne revient plus. Un moment insusceptible de reconstruction. Un moment qui s’envole. Comme se sont envolés tes mots et tes baisers. Un moment que j’ai aimé sans doute, peut-être… mais peut-être pas. Je ne sais plus distinguer réel et imaginaire, rêve et mémoire. Peu importe. Puisque tout appartient à hier désormais.
Une belle période. Une belle période que je salue. Une belle période qui m’est étrangère aujourd’hui. Une belle période superficielle de beauté, détruite par l’hiver et délaissée par l’été. Une période qui réapparaît sans cesse par le biais de nos regards perdus qui se croisent parfois comme pour mieux se séparer, des regards tristes qui se ressemblent tellement mais qui ne peuvent plus jamais coexister.

mardi, janvier 09, 2007

Réciprocité imaginaire

Je le vois en boite. Ce mec dont elle a longtemps été amoureuse. Je le vois heureux et en forme, avec une blonde qui le dépasse d’une tête. Il dit qu’il l’aime et la présente à ses amis. Il quitte tôt. Lui qui ne quittait qu’au lever du jour. Il quitte tôt pour elle… Elle travaille le lendemain.

Je vois en boite le mec qui a fait pleurer mon amie. Je vois celui qui l’a fait souffrir et qu’elle a aimé malgré les critiques et les conseils de ses proches. Je vois celui qui ne l’a jamais aimée.

Je vois en boite celui qui l’appelle toujours. Celui qui lui dit qu’il l’aime et que d’elle il devient fou. Je vois celui qui lui fait croire qu’elle lui manque, qu’il est seul sans elle et qu’il a perdu le goût de vivre. Je vois celui qui lui dit « je t’attends ». Je vois celui qui l’invite à revenir dans sa vie…

Elle me demande de lui : avec qui est-il, que fait-il, est-elle plus belle que moi ? Elle me questionne mais semble ne pas vouloir de réponses. Elle a le cœur qui bat mais ne peut pas affronter la réalité. Elle le croit. Elle veut croire ses mensonges. Elle se protège. Il la rappellera ce soir aussi. Et elle ira le voir. Elle ira le voir malgré maintes résolutions prises, promesses faites à elle-même, décisions de l’oublier. Elle lui trouvera des excuses. Elle lui pardonnera. Elle l’aime. Et elle fait d’un amour unilatéral une réciprocité imaginaire qu’elle construit et préserve rien que pour pouvoir sourire…

La plus grande des distinctions

Elle sourie. C’est un sourire angélique qui la rend… magnifique. Elle danse seule. Elle est sensuelle. Elle bouge ses hanches au rythme de la musique. Elle le fixe. Il la fixe aussi. Il joue. Elle le regarde dans les yeux. Elle n’arrête pas de sourire. Il danse avec une autre. Ils se regardent. Adorent l’interdit. Ils se plaisent dans le vice. Continuent. Intensifient le regard. Augmentent le contact. Transmettent davantage. Elle parait heureuse. On aurait dit qu’elle est aux anges. Mais elle, ne joue pas. Non. Contrairement à lui, elle a des sentiments. Elle rentrera toute seule ce soir. Seule. Seule dans le noir. Et lui, continuera sa vie mensongère, une vie qu’il déteste mais qu’il alimente quand même. Une vie dans laquelle il se perd.

Une autre femme parle de son mari. Elle dit que c’est un homme parfait que toute femme désire. Un homme qui a réussi sa carrière ainsi que sa vie familiale. Elle parle de leurs dernières vacances, de mots qui lui a chuchotés hier soir, du dernier bijou qui lui a offert… Elle en parle pour masquer sa tristesse. Elle en parle pour faire mine d’être heureuse. Elle croit qu’en faisant semblant elle le serait vraiment…

Des pouvoirs bien établis, une loi égalitaire, une administration active, des élections démocratiques, des libertés civiles bien protégées, une constitution moderne, une coexistence pacifique de divergences diverses… Que de choses louables quant à la forme. Un chaos simple quant au fond. Désordre, injustice, retards, usage de la force, haine, mépris, violence… C’est par ces mots que se résume le vrai visage de la société.

La plus grande des distinctions est celle qui sépare l’officiel de l’officieux. En apparence, l’harmonie. En profondeur, le déséquilibre. Cette distinction s’efface et perd sa raison d’être. Elle disparaît en perdant l’une de ses deux catégories. Elle disparaît au profit de la seconde… Aujourd’hui, tout n’est qu’officieux.

jeudi, janvier 04, 2007

Les aéroports

Les adieux, les retrouvailles, l’espoir de changer de vie, la possibilité de vivre autre chose ailleurs, l’imagination d’un là-bas plus accueillant, la peur de s’en aller, l’obligation de partir, l’excitation d’enfin vivre une aventure, la décision de s’éloigner, les projets réalisables à l’étranger, les ruptures douloureuses, les amours à distance, les éternels voyageurs, les pilotes, les familles décomposées, les vacances, le travail en Europe, le désir de découvrir d’autres océans, la poursuite d’un rêve… tant de choses commencent et se terminent dans les aéroports.
Des gens qui pleurent, d’autres qui sourient. Une famille de douze qui pleure un adolescent impatient de partir, un homme solitaire qui les regarde d’un tendre sourire. Des valises, des cernes sous les yeux, des passeports, du bruit, des odeurs, des gens qui se bousculent, des langues différentes, des attentes, des retards, des regards perdus, des regards impatients, des regards tristes, des regards heureux, des regards inquiets… des regards indifférents. En aéroport.
4h du matin… Je l’accompagne. Elle est déjà en retard. Elle se précipite. Elle ne doit pas manquer l’avion. Dans quelques heures, elle devra déjà être au bureau. Je la regarde partir de la fenêtre de ma voiture. Elle court. Elle se retourne une seule fois. Une fois pour faire un signe timide de la main. Je lui sourie. De loin, elle ne verra pas les larmes dans mes yeux. Je me décide à lui faire des gestes ridicules en guise d’au revoir. Mais elle est déjà partie.
Je reste quelques minutes. J’observe le chaos de cet endroit plein d’émotion. Je regarde ceux qui se séparent. Puis ceux qui se retrouvent. Préfère les premiers…
Les aéroports rassemblent et séparent ceux qui s’aiment.