jeudi, novembre 29, 2007

Un tabou tabou

Dans une société qui prétend à l’ouverture, qui réussit difficilement à formuler une phrase entière sans l’emploi excessif de mots empruntés aux langues étrangères, dont les filles se promènent librement en ville en décolleté et talons, où les bars de Beyrouth se trouvent remplis même en période de vacance présidentielle, qui ne connaît aucune censure médiatique et qui se considère comme à cheval entre l’Orient et l’Occident, est-il tabou de détecter et de dire que nous fréquentons en permanence le tabou ?

Les sociétés sont toutes, naturellement, en évolution permanente. Prétendre avoir atteint un stade optimal serait vouer le sort d’une nation à la mort. Car les besoins changent, les habitudes, les régimes politiques, les tendances, la mode… La mentalité libanaise évolue même à une vitesse supérieure et ceci en raison de l’ouverture que nous cessons de vanter, aux jeunes qui voyagent, au multi confessionnalisme qu’on tente d’apprivoiser et d’en encadrer le fanatisme, aux universités, à la francophonie etc.
Le Liban est le plus libéral des pays arabes. En effet, ses lois sont inspirées des lois françaises et il suffit de sortir dans l’une des boîtes de la capitale pour constater les libertés diverses : les mini shorts, la musique importée, la consommation excessive de l’alcool, les couples traditionnels…

Toutefois, malgré cette apparence - certes séduisante mais tellement trompeuse -, nous serions aveugle si nous refusions d’admettre que nous sommes en réalités affaiblis, trompés, trompeurs, obsédés, intimidés, complexés et ralentis par les tabous. Il existe une variété de sujets inabordables (ou qui ne le sont qu’avec un nombre réduit de personnes), de vérités à cacher, de réalités à enfermer à jamais dans un tiroir… Quoique ouverts d’esprits, nous sommes tous, nous libanais, attentifs aux comportements d’autrui pour les évaluer selon une échelle de valeurs emprunté à la plus archaïque des sociétés, que l’on oublie quand il s’agit de vouloir se prouver libéral et que l’on ressort quand ceci servirait à exercer notre esprit critique.

Sexe, contraception, pilule, gynécologue, préservatif, bêtise d’une soirée, réflexe d’une fille amoureuse, concubinage, voyages à deux… Que des problèmes sans issue car notre société est très sourde mais très peu muette. Certains évoquent le caractère oriental, contrebalance nécessaire du libéralisme, spécificité de notre pays. Mais les solutions à ces problèmes (parmi tant d’autres) ne seront jamais trouvées et si trouvées hors portée, quand les difficultés ne peuvent être dites et quand dites, très vite condamnées à mort.
Si les jeunes se montrent plus conscients, moins bornés, plus ouverts et se comportent parfois de façon plus que libérale, ils plongent en réalité dans l’illusion et créent des relations mensongères et hésitantes car dictées par le regard de l’autre, méfiantes car redoutant les rumeurs, éphémères car loin d’être tout à fait transparentes.

Je ne veux pas croire que notre société est ouverte. Elle est loin de l’être. Et si elle est en phase transitoire, il existe tout de même un décalage alarmant entre les générations. Le changement de mentalité se fait à long terme, certes. Mais il est temps de prendre l’initiative de changer. Et si la société libanaise est un "il" jaloux de sa virilité, elle ne fait que l’affaiblir par tant de lâcheté. Oui, elle est lâche. Combien de jeunes libanais s’installent ensemble à l’étranger et le cache une fois rentrés à Beyrouth pour les vacances ? Combien de couples se font des week-ends à deux qu’ils disent à vingt quand il s’agit de raconter ?

J’ai tout aussi peur des tabous. D’ailleurs, j’ai souvent retardé l’écriture de ce texte ne sachant comment m’y prendre, comment transmettre l’idée et comment percer les véritables tabous. J’ai trop hésité. Ce qui explique ma très longue introduction et des phrases qui tournent parfois en rond... Car, malgré ma tendance à vouloir tout (et trop) écrire, je ne parle ouvertement qu’à quelques amis qui m’avouent qu’eux aussi, derrière le regard sûr, la parole éloquente et l’esprit ouvert n’osent tout dire... La vie privée reste sacrée. Mais la vie, pour être plus facile, n’attend parfois qu’à être discutée.

4 commentaires:

мσнη∂ιš a dit…

un très bon texte , merci

Anonyme a dit…

je te lis tjr, ms aucun commentaire ne serai ala hauteur...
un sourir humble fera laffair :)
je tembrass tres for
fais attention a toi
still lookin forward for a cup of coffee
surtt pr discuter ce dernier texte il est fantastique
T.

Karen Ayat a dit…

Merci enormement.
G ete tres occupee c derniers jours.
A bientot T, surement. gros bisous

~Chris~ a dit…

tu le fait a merveille... et si... seulement si...
ciao toi...
Chris