mercredi, mars 28, 2007

L’une de mes deux vérités

C’est un moment étrange qui s’installe. Un de ces moments qui nous obligent à parler pour combler le vide. Alors on commence à poser des questions à la personne en face, rien que pour faire semblant d’être intéressé. On s’efforce à engager une conversation parce que franchement, quand on est deux dans une salle vide et quand on est obligé d’attendre une heure au moins, il n’y a rien d’autre à faire. On fait même semblant d’écouter. On pense à autre chose : à une rencontre, à un examen, à un problème, à une sieste toujours trop chère… Et l’autre continue à parler. La meilleure, c’est quand cette personne décide de parler politique. Comme si son avis avait de l’importance quand par hypothèse la politique ne m’intéresse pas. Lucide, elle remarque que mes paupières se font lourdes et que je m’en fous. Alors elle me pose des questions sur moi. On lui a probablement dit qu’en étant intéressée elle serait intéressante. Mais ce matin, je n’avais même pas envie de parler… Et surtout pas de moi. Mais elle continue. Par devoir. Et me demande ce que je fais dans la vie. Bien sûr, elle parlait des études. Pourtant ma première réponse, celle que j’ai gardé pour moi, racontait mon dernier coup de foudre. J’ai choisi la seconde. Celle qui est moins bien. Et de loin. Je lui ai dit que j’étudiais le droit. Et c’est à ce moment-là que ses yeux ennuyés se firent grands et ronds. C’est à ce moment-là qu’elle montra son étonnement et qu’elle fut réellement intéressée. Je dirais même qu’elle fut amusée par ce que je venais de lui dire. Elle se garda d’exploser de rire mais ses yeux trahissaient son jugement : elle trouvait la scène ironique. Je lui demandai des explications. Elle pensait que j’étais trop douce pour faire du droit. Et que je ne pouvais réussir. Elle pensait que ça ne m’allait pas. Qu’il fallait être dur, blessant, sauvage, fort, impoli. Elle pensait que j'etais trop... blonde? Elle avait une mauvaise conception du Droit. L’heure s’était écoulée. J’entendis mon nom. Je pouvais quitter la salle désormais. Je fis quelques pas mais fis rapidement demi tour. Je lui dis que comme tout le monde… elle ne vit que l’une de mes deux vérités.

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